« Intelligence Artificielle sur l’Activité Policière »
Chercheuse post-doctorante, IMT Atlantique École Mines-Télécom (Nantes) –Laboratoire LEMNA, Département de Sciences Sociales et Gestion (SSG), coordinateur du projet : Florent Castagnino, ANR IAAP 21-CE26-0023
Vidéosurveillance « intelligente », reconnaissance faciale, cartographie prédictive, etc. sont autant de dispositifs venant renouveler l’action policière. Ils sont censés construire des « villes sûres » / « safe cities » grâce aux apports de l’intelligence artificielle (IA). Ce programme étudie plusieurs projets de « safe city » en France et au Canada utilisant des technologies de vidéosurveillance automatisée et de prédiction des phénomènes criminels et délictuels, notamment par de l’apprentissage machine. Il s’agit d’analyser les effets concrets de l’IA dans le travail policier. En suivant l’hypothèse d’une « scientifisation » du savoir policier, on se demandera comment les procédés algorithmiques changent les modes de connaissance et de représentation des phénomènes de délinquances : passe-t-on d’une police de l’information au « big data policing » ? Ces outils entraînent-ils les politiques de sécurité publique vers de l’action prédictive ou sont-ils avant tout des outils de rationalisation de l’activité policière ? Comment la mise en débat des outils d’IA à des fins de sécurité urbaine – soulevant de forts enjeux de libertés publiques et de protection des données personnelles – pousse-t-elle les chercheurs et développeurs informatiques à intégrer des questions politiques et sociales dans leurs productions scientifiques et techniques ?
Dans le cadre du projet, je réalise une enquête de terrain mobilisant des méthodologies qualitatives. Plus précisément, je mène des entretiens semi-directifs et des observations au sein d’une équipe des agents de la police nationale et de la police municipale d’une ville française du sud pionnière à la mise en place des nouvelles technologies dans la prévention de la délinquance. En parallèle, je mène une analyse textuelle à l’aide du logiciel Iramutec des documents de consultation publique sur les conditions de déploiement des caméras dites « intelligentes » dans les espaces publics lancée par la CNIL. L’objectif de cette analyse est de comprendre et de cartographier les positions des acteurs qui contribuent au marché de la vidéosurveillance automatisée et des représentations sur les pratiques des professionnels de la sécurité.
Composition de l’équipe :
– Sciences sociales : Florent Castagnino, Myrtille Picaud, Jacques de Maillard, Renaud Epstein
– Informatique : Lina Fahed, Philippe Lenca, Matthieu Delahaye
– Mots-clés : intelligence artificielle et safe city, sociologie de la police, sociologie des sciences et techniques, gouvernement et sécurité urbaine, méthodes qualitatives, analyse textuelle
« Ambiances du (contre)terrorisme dans les villes européennes »
Chercheuse post-doctorante, PLACES – Université Paris Cergy, coordinateur du projet : Damien Masson, 2021-2023, ANR ACT-EU (EST0110171)
Cette recherche fait l’hypothèse que la lutte contre le terrorisme urbain ne se limite pas uniquement au renforcement des infrastructures sécuritaires, des barrières de tous ordres, des opérations d’urgence, raids et confinement. L’enquête propose une comparaison internationale qualitative et quantitative à grande échelle, de la manière dont la lutte contre le terrorisme et la sécurité urbaine interagissent avec l’expérience quotidienne des villes en Europe. Une enquête par questionnaire, sur l’expérience quotidienne de la menace terroriste, et des réponses associées sera menée auprès d’habitant-e-s de France, d’Allemagne et du Royaume-Uni. Elle sera complétée par des ethnographies et des enquêtes de terrain dans 5 villes (Berlin, Birmingham, Nice, Paris et Plymouth) ayant des histoires d’attaques, de niveau de menace et de réponses politiques ou aménagistes contrastées. Ce projet est une collaboration entre CY Cergy Paris Université, l’Institut Paris Region (financés par l’ANR), les Universités de Plymouth (financée par l’ESRC) et Friedrich-Schiller-Universität Jena (financée par la DFG), dans le cadre d’une réponse à l’appel Open Research Area (ORA) 6e édition.
Équipe française : Damien Masson, Rachel Thomas, Camille Gosselin
Équipe allemande : Simon Runkel, Katharina Ciax
Équipe anglaise : Sara Fregonese, Paul Simpson, Carrie Benjamin, Samuel Berlin
– Mots-clés : anti-terrorisme, militarisation, sociologie urbaine, émotions collectives, ambiances urbaines, méthodes qualitatives et quantitatives
– Site Internet de la recherche : https://atmoct.org
« Des lâches et des héros. Le discours de l’armée sur les suicides et les accidents mortels des appelés et des militaires de carrière sous le prisme du nationalisme et du genre »
Chercheuse associée au Laboratoire d’Analyse Sociale et Recherche Sociale Appliquée du Département de Sociologie de l’Université de Crète (Réthymnon)
L’objectif de cette enquête est d’interroger les dynamiques du genre et du nationalisme telles qu’elles s’expriment par les discours différenciés sur les morts par suicide et par accident des militaires de carrière et des appelés. Le point de départ du projet vient d’un constat de ma recherche de thèse : l’institution militaire développe un discours différencié sur les morts et les suicides des professionnels et des conscrits. Les professionnels qui ont perdu leur vie en temps de paix sont présentés par l’institution comme des héros morts pour la patrie, des hommes braves et audacieux, alors que pour les accidents mortels des conscrits (très nombreux – estimés à 120 par an), l’armée se contente de simples annonces, voire responsabilise la personne décédée. Les suicides des militaires de carrière sont quant à eux présentés comme la conséquence du déclin du nationalisme et du patriotisme qui aboutit à la marginalisation de l’institution et à la dévalorisation de ses membres (est sous-entendue ici une « crise de masculinité » militaro-virile). Au contraire, les appelés suicidés sont présentés comme des lâches et des faibles, des non-virils.
Dans un premier temps, il faut distinguer les types de discours publics, selon que les morts soient des officiers ou des conscrits, des suicides ou des accidents. Dans un second temps, il s’agit d’analyser les contenus de ces discours pour comprendre comment l’institution pense les morts en temps de paix et conçoit le rôle des hommes en tant que protecteurs de la nation. La recherche étudiera les discours informels et formels afin de mieux comprendre comment, malgré l’apparente parcimonie de l’institution en matière de communication, l’armée contribue bien à façonner un jugement de valeur sur les masculinités en les divisant entre bonnes et mauvaises, désirables et indésirables, entre celles qui représentent la nation et celles qui lui font « honte ».
En collaboration avec Athéna SKOULARIKI (Professeure associée, Université de Crète).