Vendredi 31 mars 2017, site Pouchet du CNRS.
International Workshop organized by : Carlotta Benvegnù (University of Padua, Université Paris 8 Cresppa-CSU) and David Gaborieau (Université Paris Est, Lab’Urba).
Journée d’étude internationale (en anglais) organisée dans le cadre du programme de formation-recherche CIERA « Les mondes de l’entrepôt », associée au programme ANR WORKLOG, cofinancée par le CIERA, l’Université Paris-Est et le Cresppa-CSU.
Presentation
During the last 30 years, the logistics sector has become a key function of the global economy. Nevertheless, social sciences have only recently taken into account the importance of this transformation, trying to depict its impact on the economic systems as well as on working conditions. This conference aims at fostering a dialogue between different researches that, on an international scale, address logistics as an object, a perspective, or even as an analytical concept.
Ensuring the circulation of commodities, semi-finished products and raw materials, logistics can be conceptualized as the infrastructure of globalization. The reorganization of the economies into transnational systems that criss-cross national borders, linked to the transfer of industry plants in low-wage countries, as well as the development of just-in-time production, have impulsed the important growth of the sector. But the development of logistics as an autonomous sector is also the result of the externalization fostered by the big companies of those functions previously considered as marginal or not strategic. At the same time, the evolution of the logistics sector can also be connected to the growth of the retail industry and, more recently, to the expansion of the e-commerce - which hidden face is the concentration inside warehouses of commodities destined to supermarkets or directly to customers. Therefore, depending on the way we observe it, logistics can be presented as a key sector or as a subaltern function, as an innovation or as the prolongation of something older. However, its development has undoubtedly impulsed major transformations of the economic systems, which explains why logistics is today considered as a crucial tool to analyse contemporary capitalism.
From a managerial standpoint, logistics promotes an ideal of smoothness and fluidity, perhaps even the ideal of a dematerialized economy regulated by flows of information. On the contrary, observed from the bottom up, logistics appears as an industry where a large labour force is increasingly needed in order to assure the circulation of goods and raw materials, rather than a continuous flow requiring little interventions. This workforce is either concentrated inside warehouses, ports and airports, or scattered within various companies. Logistics activities are heterogeneous relying on the type of products and markets, and recruitment processes depend also on the sectorial, regional and national contexts. However, logistics shows a number of characteristics that allows to study it as a whole : subcontracting chains, flexibility, traceability control and growing pressure on working conditions. Some important trends have also been observed concerning the employment structure, in particular processes of precarization and racialization of the workforce, as well as the weakening of labor unions. This leads to ask the questions of what a “logistics working class” might be, which place it might occupy inside the social hierarchy, which kind of subjectivity it expresses, as well as to investigate the forms of resistance that are played in this sector.
Ouvriers des entrepôts. Étudier le travail dans les mondes logistiques
Ces trente dernières années, le secteur logistique s’est affirmé jusqu’à revendiquer une place centrale dans le fonctionnement de l’économie mondiale. Toutefois, ce n’est que depuis une période récente que les sciences sociales ont pris la mesure de ces transformations et ont essayé d’en saisir les caractéristiques et les répercussions du point de vue des systèmes économiques, de l’emploi et du travail. Cette journée d’étude ambitionne de faire dialoguer des travaux de recherche qui abordent à l’échelle internationale la logistique comme objet d’étude, angle d’approche ou concept d’analyse.
Assurant la circulation mondiale des produits finis, semi-finis et des matières premières, la logistique peut être considérée comme une infrastructure de la globalisation. La réorganisation des économies en systèmes transnationaux, liée au transfert d’une partie des installations industrielles dans les pays à bas coûts de production, ainsi que le développement du système de production en juste-à-temps, avec peu de stocks intermédiaires, ont en effet entrainé une forte croissance du secteur. Mais l’émergence de la logistique en tant que secteur autonome est aussi liée à l’externalisation par les grands groupes industriels et commerciaux de leurs fonctions auparavant jugées annexes ou pas suffisamment stratégiques. Elle peut également être rattachée à l’essor de la grande distribution et plus récemment du commerce en ligne, dont la face cachée est la concentration et la manipulation en entrepôt des produits à destination des supermarchés ou des particuliers. Selon la façon dont on l’observe, la logistique peut donc être présentée à la fois comme un secteur clef ou comme un acteur subalterne, comme une nouveauté ou comme un prolongement. Dans tous les cas, son développement induit des transformations fondamentales dans les systèmes productifs, ce qui explique que la logistique soit désormais mobilisée comme un angle d’approche pour l’analyse du capitalisme contemporain.
Du point de vue managérial, la logistique propose un idéal de connectivité et de fluidité, voire d’une économie dématérialisée régulée par des flux d’informations. Mais observé par le bas, le secteur renvoie une tout autre image que celle d’un écoulement continu nécessitant peu d’interventions. Il se présente sous la forme d’une industrie qui, pour produire la circulation des biens et matières du capitalisme, a recours à une main d’œuvre nombreuse. Très majoritairement ouvrière, cette dernière est concentrée dans des entrepôts, des ports et des aéroports, ou bien disséminée dans les entreprises qui ont recours à cette fonction. Les activités logistiques ne sont donc pas homogènes et diffèrent notamment selon le type de produit manipulé et le type de marché desservi. Elles mobilisent également différents types de salariat selon les contextes sectoriels, régionaux et nationaux. Pour autant, la production du flux rassemble bien certaines caractéristiques qui encouragent à observer la logistique comme un tout : la pression des commanditaires, la variabilité des volumes, le contrôle de la traçabilité ou la pénibilité liée au port de charges. Des tendances lourdes ont également été observées dans les formes d’emploi, en particulier la précarisation croissante des statuts, l’affaiblissement de la représentation syndicale, et des processus de racialisation de la main d’œuvre. Ces proximités en termes de conditions de travail et d’emploi encouragent à poser la question de ce que peut être un prolétariat logistique, de la place qu’il occupe dans la hiérarchie sociale, des subjectivités qu’il exprime, ainsi qu’à interroger les formes de résistance au travail et à l’emploi dégradés.
– Contacts : carlotta.benvegnu@gmail.com ; david.gab@wanadoo.fr
– Programme détaillé sur Calenda
– Carnet de recherche WORKLOG – Les mondes ouvriers de la logistique