3ème colloque du RT14 (Arts et culture) en partenariat avec le RT24 (sexe, race, classe: rapports sociaux et construction de l’altérité) de l’Association Française de Sociologie.
Comité d’organisation: Anne Bessette, Clément Combes, Florencia Dansilio, Chloé Delaporte, Artemisa Flores Espinola, Marjorie Glas, Camille Gourdeau, Emmanuelle Guittet, Kaoutar Harchi, Élodie Hommel, Louis Jesu, Kevin Le Bruchec, Alexandre Robert, Marie Sonnette, Cécile Talbot.
Les mondes sociaux des arts et de la culture, saisis par la sociologie, apparaissent structurés par des luttes individuelles et/ou collectives visant le monopole du mode de production légitime. Accéder au statut d’artiste « tout court » (Ambroise, 2001) ou à des positions établies dans les professions culturelles demeure le privilège de certains hommes blancs et appartenant aux catégories socioculturelles moyennes et supérieures. Pour ne prendre que l’un des rapports de pouvoir, de nombreuses enquêtes ont montré la répartition genrée des rôles dans les mondes professionnels des arts (sur le jazz cf. Buscatto, 2007; sur la danse cf. Sorignet, 2010) et la difficulté pour les femmes d’accéder à des positions visibles et consacrées (sur l’art contemporain cf. Moulin, 1992 ; sur la littérature cf. Naudier, 2000 ; sur la musique d’orchestre cf. Ravet, 2011). De la même manière, les pratiques culturelles connaissent une distribution inégalitaire en fonction des appartenances sociales et genrées des publics (Donnat, 2009). Les pratiques elles-mêmes peuvent être assignées au populaire, à son inculture supposée (sur les orchestres d’harmonie cf. Dubois, Méon et Pierru, 2009) ou à l’exotisme des banlieues (sur la musique rap cf. Hammou, 2012).
Le genre, la classe et la race produisent donc des effets sur les critères d’appréciation, de jugement et de classification. En effet, dans des champs extrêmement compétitifs, la sélection se fonde sur l’idée d’une « qualité artistique » qui naturalise les hiérarchies et masque les processus de sélection et de cooptation pratiqués par les acteurs dominants. Au sein des hiérarchies artistiques, on observe l’assignation de créateurs et de créatrices, d’oeuvres créées, de genres artistiques ainsi que de publics à une position subalterne.
S’il existe une longue tradition de travaux s’intéressant aux diverses formes de domination de genre et de classe dans le champ intellectuel et artistique, ceux-ci se sont souvent focalisés sur une seule de ces dimensions : on pense notamment aux travaux déjà cités. En revanche, les travaux sur la race sont bien plus rares en France, les débats sur l’usage du concept étant toujours vifs et les études quantitatives difficiles à mener dans un contexte où les statistiques dites ethniques sont proscrites. Nous l’employons ici au même titre que le genre et la classe – donc sans guillemets – en le saisissant comme une construction sociale, produit d’un rapport social de domination : le racisme (Guillaumin, 1972).
L’objectif de ce colloque est justement d’interroger les objets classiques de la sociologie des arts et de la culture en prenant explicitement en compte l’articulation de plusieurs rapports de domination. Nous avons choisi de nous centrer sur l’articulation des rapports sociaux de genre, de classe et de race. Dans un but inclusif et réflexif, il s’agit également de penser les outils d’analyse que l’on doit à la pensée féministe que sont les notions d’articulation, d’imbrication (Falquet, 2016) mais aussi d’intersectionnalité (Crenshaw, 1991) et de consubstantialité des rapports sociaux (Galerand et Kergoat, 2014) afin de porter le regard sur les dimensions politiques des arts et de la culture. Les communications pourront donc interroger les concepts théoriques et épistémologiques utilisés pour étudier ces articulations.
Enfin, si l’organisation du champ de production symbolique tend à confiner certains acteurs culturels ainsi que les créations dans des espaces marginaux, différenciés des espaces de légitimité symboliquement prestigieux et économiquement rémunérateurs, il importe néanmoins de demeurer attentif à la constante reconfiguration des rapports de force, comme le mouvement dit « #metoo », impulsé par les femmes de l’industrie cinématographique hollywoodienne nous l’a monté dernièrement. Si nous ne pouvons souscrire à une vision enchantée des pratiques artistiques comme nécessairement émancipatrices, ainsi que du champ culturel comme espace de liberté, l’effort sociologique est nécessaire pour reconstruire le point de vue de ceux qui, tout en étant agis, ne cessent pas pour autant d’agir (Butler, 2006 ; Achin et Naudier, 2013) et donc de repenser l’agency, cette capacité d’agir, de se réapproprier une histoire, une mémoire, une condition. L’assujettissement aux rapports sociaux de race, de classe et de genre est dès lors constamment perturbé par des déplacements, des oscillations, des renversements qui justifient une approche des arts et de la culture prenant en compte à la fois les contraintes et les subversions.
9h30 - 10h00 Introduction
Florencia Dansilio (Université Sorbonne Nouvelle - Paris 3, Creda) pour le bureau du RT14 de l’AFS, Claire Cossée (Université Paris-Est Créteil, Lirtes) pour le bureau du RT24 de l’AFS, Artemisa Flores Espínola (Cresppa-CSU), coordinatrice du colloque
10h00 - 11h00
Session 1 : Représentations des rapports de pouvoir au sein des œuvres 1/2
11h30 - 13h00
Session 2 : Constructions politiques et juridiques des catégories artistiques et sociales
14h30 - 15h30
Session 3 : Minoritaires/majoritaires dans les musiques populaires
16h - 17h
Session 4 : L’illusion de la neutralité : la réflexivité des chercheur.e.s face à leur terrain d’enquête
17h30 - 19h30
Table ronde : La création à l’épreuve de la violence sociale
9h30 Accueil
10h - 11h
Session 5 : Représentations des rapports de pouvoir au sein des œuvres 2/2
11h30 - 13h
Session 6 : Risques et épreuves dans les professions, carrières et trajectoires artistiques
14h30 - 16h
Session 7 : Métiers et groupes professionnels au prisme de l’intersectionnalité
16h30 - 18h
Sessions 8 : Élites artistiques : accéder à la consécration et conserver sa position
18h : Conclusion
Viviane Albenga (IUT Bordeaux Montaigne, MICA) pour le comité scientifique du colloque.
CSU: Axe « Ville » : catégories et ségrégations urbaines | Axe « Culture » | Axe « Santé » | Positionnements méthodologiques |
GTM: Axe1. Dynamiques sociodémographiques | Axe 2. Migrations, mobilités et pays du Sud | Axe 3. Le travail à l’articulation des relations entre métiers et expression différenciée des émotions |
LABTOP: Axe 1 : “Représenter” | Axe 2 : Cirulations transnationales et asymétries de pouvoir | Axe 3 : Genre et Biopouvoir | Questions transversales |