Anne-Marie Devreux, Coline Cardi et Louise Langevin (dir.), "La régulation du genre dans la coexistence des niveaux de droit : regards croisés Europe-Canada/The Regulation of Gender in the Co-Existence of Levels of Law : Conversations between Europe and Canada", Canadian Journal of Women and the Law/Revue Femmes et Droit, Volume 28, Issue 3, novembre 2016.
Premières lignes de l’introduction
"Quelle que soit leur histoire politique, au cours de leur fédéralisation, les États européens ou les provinces canadiennes ont mis en place une superposition des niveaux de droit. En conséquence, ils ont multiplié le risque de contradictions ou, au moins, d’interprétations paradoxales entre les règles communautaires et les règles locales, nationales ou provinciales. S’ajoutent à ce mille-feuille la couche internationale des droits fondamentaux et celle des règles défendues par les différentes cours internationales de justice, qui encadrent certaines pratiques nationales, voire entrent en conflit avec les lois nationales, jusqu’à obliger les États à les modifier. C’est notamment ce qu’on observe en matière de régulation des rapports sociaux de sexe. En Europe par exemple, la Cour européenne de justice dit maintenant le droit en cas de conflit entre une citoyenne ou un citoyen européen et la justice de son pays. Cette possibilité a, dans la période récente, conduit cette Cour à prononcer des arrêts qui ont amené les États à bouleverser leur ordre juridique jusque-là en vigueur, notamment dans le domaine de l’égalité de droits entre hommes et femmes.
En mettant en perspective des travaux sur l’évolution du cadre juridique européen et d’autres sur les systèmes de droit du Canada et, plus spécifiquement du Québec, ce numéro de la Revue Femmes et Droit permet d’éclairer la dynamique des rapports sociaux de sexe telle qu’elle est reproduite, mise en jeu ou transformée par les conflits juridiques et par la dimension de plus en plus poreuse et évolutive des droits. Pour cela, nous avons fait le choix de la transversalité et du décloisonnement afin d’appréhender le plus possible toute la « chaîne du droit » sous l’angle du genre —le droit étant ici pensé comme un « processus de création normative continu », qui reproduit la « subordination des femmes », en même temps qu’il produit les rapports sociaux de sexe.
Cette dynamique est en effet analysée à travers différents domaines du droit ou d’application du droit que les articles ici réunis permettent de faire dialoguer : les contributions s’intéressent ainsi aux sphères du droit civil (en matière familiale, d’indemnisation des victimes, et de protection de l’enfance), du droit du travail, du droit social ou encore du droit pénal. Cette mise en dialogue permet de révéler un continuum : le droit est bel et bien sexospécifique ou genderblind, et de nourrir les travaux sur la transversalité du genre, qui est donc non réductible à certains espaces spécifiques de régulation. [...]" Lire l’introduction
Maîtresse de conférences à l’Université Paris 8
Cresppa-CSU
Page personnelle
Directrice de recherche au CNRS
Cresppa-CSU
Page personnelle